nb : j' ai appris l' an dernier, en juin 2018, qu' en fait la batârde née de Père inconnu  au pied de ce donjon, avait des origines allemande et juive côté paternel. Les Parents de mon Père étaient des Allemands qui avaient fuient le nazisme en 1936 pour partir se réfugier au Canada, en Colombie britannique, dont ils ont pris la nationalité.
 
Mon Père, un sous-officier Canadien, débarqué le 6 juin 44 à Juno Plage en Normandie, mort en Indochine alors que j' avais 7 mois....
 
Toute ma vie j' ai souffert de ne pas savoir qui était mon Père, la famille Duton s' efforçant de me le cacher, un chagrin silencieux et immense . D' un côté je peux les comprendre les Duton, ils avaient subi deux guerres mondiales et avaient été Résistants alors ils n' aimaient guère les " Boches " pour cette raison. Ce fut pourtant Momo, encore lui, qui invita le premier les jeunes Allemands à venir travailler sur les chantiers au titre de la Réconciliation franco-Allemande, au tout début des années 60.
 
Aujourd' hui je me bats bec et ongles pour que les gamins que certains s' apprête à construire et à livrer en Kit ( GPA )  aient au moins accès à leurs origines !
 
Ajout au texte le 22 février 2019
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Maurice Duton
 
                            dit Momo
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Comment aborder cet homme qui a laissé de son passage sur terre parmi les vieilles pierres bien peu de gens indifférents  pour ceux qui l' ont connu !
 

Par les uns adulé, par les autres décrié et par moi, sa nièce, redouté
.
 
Il faut dire qu' à mon encontre il n' y allait pas toujoursde main morte.
Et c' était neuf fois sur dix, sans raison !
 
Je l' appelais " mon oncle Maumau " avec autant de crainte que de respect.
 

Il en était toujours ainsi quand nous étions en famille entre Duton. Enfin le temps qu' il a daigné tous nous fréquenter NOUS  "  les autres Duton " .Sinon je devais lui donner du " Monsieur Duton " devant les visiteurs, étrangers au château, qu' il recevait.
 

.Mis à part ce désagrément je ne compte plus les fois où j' ai été virée séance tenante de ce château sans cause ni explication. Sa manière à lui de faire savoir qu' il était le chef des lieux en impressionnant, sans risque,  tous ceux dont il avait la charge : ces Jeunes qui nous entouraient.
 

Ce genre d' humilation intimidante était toujours publique et ne se déroulait que le temps de la pleine saison des chantiers.
 

Durant la morte saison, une fois qu' il se retrouva divorcé , femme et enfant ayant plié bagages en laissant ainsi derrière elles la forteresse déserte, je redevins Zabeth, celle  pour qui  il  faisait montre d' un peu plus d' égard  à titre d' impérieuses nécessités. Mau-Mau, c' était connu, n' aimait guère se coltiner  les petits problèmes ordinaires de la vie et préférait les voir se régler d' eux-même  en venant s' échouer tout cuits au pied de son fauteuil.......par la grâce obligée de quelques " serviteurs..." triés sur le volet.
 
Pour ne citer que le cas de ce  facteur , un copain d' enfance à lui, qui rechignait de son côté à monter jusqu' au château pour  " apporter le courrier  à  Mau-Mau " . Courrier qu' il laissait au bon soin du Presbytère lors de son passage.  A charge de....
 
Je me retrouvais ainsi  désignée d' office pour la corvée, accompagnée ou non de ma grand' mère.  Toutes deux  souvent chargées comme des baudets grimpant, fourbues, vannées, la fameuse côte du fort.  Les lettres n' étaient pas les plus lourdes à porter  c' était plutôt du côté provisions en tout genre qu' on peinait....
 

A propos de ce ravitaillement, parviendrais-je un jour à oublier les hurlements du chien de garde, un molosse  enchaîné le jour et enfermé la nuit dans le musée pour protéger ce dernier , qui crevait de faim une partie de l' hiver  . La raison pour laquelle j'allais chercher pour lui des déchets à la boucherie  avec les minces pourboires que la distribution  de la presse catho me rapportait. Ainsi il me paraissait moins pénible de devoir  accomplir  la corvée aller-retour  un soir sur deux  au château ne serait-ce que par pitié pour ce malheureux clébard abandonné aux - bons soins -  de Mau-Mau par son précédent maître...
 

Je n' ai jamais su comment  il s' appelait ...Je pense qu' il  souffrait vraiment de la faim  car lorsqu'il  avait le ventre plein, plus personne ne l' entendait hurler à la mort dans les rues en contrebas de la forteresse..
Il mourut abattu d' un coup de fusil un jour où il s' était échappé, terrorisant dans sa fuite deux ouvriers d' EDF qui étaient venus installer un poteau électrique.
 

Il avait de sérieuses raisons d' être devenu fou la pauvre bête.
 
Deux chiens plus tard , Gilou lui succéda en tant que nouveau gardien  du château, et lui eut droit à un nom mais aussi à un régime moins spartiate une fois la célébrité venue pour le maître et le château et les moyens en découlant. Gilou n' eut donc  jamais à se plaindre du traitement qui lui fût accordé, il pouvait même se balader librement à son aise. Les Jeunes du Fort l' adoraient.'  lui qui était chargé de les extirper de dessous leurs tentes chaque matin  en allant fouiner avec le bout de son nez glaçé  contre leurs visages à peine éveillés,  incitant les Jeunes  à tenter de s' enfuir  encore  plus profond dans la chaleur de leurs duvets.
 

En plus du souvenir pénible du pauvre clébard sans nom, il m' arrivait de devoir traverser la forteresse, ou du moins les ruines qui en restaient, pour aller éteindre la lumière du donjon qui, telle une sentinelle, veillait sur la ville ces longues nuits d' hiver,  ...
 
Je me souviens des prises de jus qui m' électrisaient la main et le bras jusqu' au coude...
 
Il fallait tourner l' interrupteur  à la vitesse de l' éclair si on ne souhaitait pas y rester accroché pour la nuit ou pour la ....vie,  ce que je redoutais le plus ! Puis reprendre le chemin inverse pour revenir  au  PC de Monsieur le Duc dans un noir total les nuits sans lune, et quand ce n' était pas dans la pire des gadoues ! Avec à la main une torche électrique des plus capricieuses, qui rarement fonctionnait.
 

.Je passe sur les " dépannages " de l' automobile de marque anglaise trop souvent en panne  ( un cadeau " empoisonné "qu' on lui avait fait ) et qu' il devait souvent pousser entre les murs étroits de l' Entrée de la Porte de Paris pour qu' elle consente à démarrer  au-delà des remparts...Tandis qu' assise au volant et tétanisée d' effroi je redoutais de rayer la carosserie en faisant une mauvaise manoeuvre ... Ce qui m' aurait frappé illico  d' une excommunication définitive du château  tant il tenait à cette voiture !
 
Mau-Mau c' était pour moi l' appréhension, la panique, les menaces.
Une sorte d' autocrate, un despote, le tyran absolu.
 
Mais Mau-Mau c' était mon oncle malgré tout, je devais faire avec !
 
Et puis je l' aimais bien quand même  Mon Oncle Mau-Mau , même s'il lui arrivait parfois de me traiter de ...bâtarde  tels certains de ses chiens perdus sans collier !!!